Quelques CONSEILS pour RÉUSSIR vos PHOTOS de voyage

Conseils photo - Lignes de force - Canal Vassé Annecy
Le Canal Vassé, Annecy

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, a vu des paysages à faire baver un canard et a pris plein de photos ! Vous avez prévu de faire une de ces fameuses “soirées-diapo” (enfin, je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans…) où tout le monde s’endort sauf vous qui racontez comment vous avez rencontré un gars super sympa quand vous étiez perdu dans les souks de Marrakech et que… Vous vous voyez déjà préparé les toasts au tarama ! Sauf que… sauf que, de retour à la maison, vous commencez votre tri sur votre ordinateur et vous vous dîtes : “Je suis dégoûté(e) ! Ça rend rien ! Mes photos de voyage sont nulles !” etc…

Après avoir donné quelques éléments de réponses au sujet du matériel photographique selon les circonstances, je vous présente ici quelques humbles conseils photo (basiques et très non exhaustifs !) pour vous aider à réaliser des clichés qui ont un peu plus de niaque !

© L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷

UNE PHOTO N'EST PAS LA RÉALITÉ !!

Ou, comme l’a dit l’artiste catalan Joan FONTCUBERTA, “Toute photographie est une fiction qui se prétend véritable”. À vous donc de construire l’image fiction de votre réalité touristique. Avant de poursuivre la lecture de cet article, il est nécessaire, il me semble, de vous apprendre à vous poser la question : “qu’est-ce que je veux ?”. Il y a deux types de photos de voyage : l’anecdotique et l’esthétique ou, en d’autres termes, celle de Bernard en train de manger une vanille-chocolat devant la Tour Eiffel et, la picturale, celle qui, au-delà du souvenir qu’elle contient, retient l’attention et séduit l’œil. Je ne fais aucun jugement moral, chacun fait comme il l’entend mais, concernant la première, je n’ai pas grand-chose à vous dire ici (sinon peut-être d’aller voir les photographies de Martin Parr…).

Dans le second cas (en même temps, vous avez déjà fait l’effort de venir jusque là), il va vous falloir admettre qu’une image n’est pas la réalité ! Au-delà de cette évidence (finalement pas si évidente), la question est d’admettre l’impossibilité d’une image à représenter une réalité. En voyage, on peut avoir tendance à vouloir tout prendre, tout garder, tout remporter à la maison mais une photographie ne retranscrit pas (… ou mal) une odeur, une sensation, une émotion… et je vous parle même pas du sublime d’un paysage. Même s’il faut prendre avec des pincettes ce que je viens de dire, il s’agit bien de considérer qu’une photographie sera :

  1. un fragment d’une réalité “objective”
  2. un parti pris “subjectif” (un style, ou plutôt une manière)

C’est à dire que vous allez devoir faire des choix. Et ce sont ces choix qui amèneront une dimension picturale à vos photos de voyage, qui leur donneront un attrait, une dimension supplémentaires, et du coup son autonomie picturale. Et c’est d’ailleurs cela que les regardeurs observeront puisqu’ils n’auront accès qu’à cela : l’image (sans l’anecdote, sans votre expérience personnelle réelle).

Mais, calmos calmos, on va faire les choses en douceur, sans prétention de vous transformer en Lucien Hervé ou en David Lachapelle. On va prendre les conseils photo les uns après les autres.

LA PRISE DE VUE

Comment faire une image ? Vaste programme !! Quels sont les aspects sur lesquels vous pouvez jouer ? Comme je vous disais plus haut, au-delà du contenu de l’image, il faut penser la manière. Alors je l’accorde (d’alpinisme ? ok, elle est nulle celle-là…), on a pas toujours 30 minutes pour réfléchir à tout ça mais à force de juste se poser quelques questions, cela aiguisera l’œil et deviendra par la suite des réflexes (non, pas de jeu de mots là). Surtout, il faut bien comprendre qu’il n’y a aucune règle !! L’Histoire de l’Art est une perpétuelle remise en cause des règles. Donc des conseils photo, oui, mais aucun dogme, surtout aucun !! Mais des questionnements et plein de solutions à expérimenter !! De manière plus détendue, faut voir ça comme une cuisine, vous allez faire votre popote avec les différents ingrédients ci-dessous :

La composition et le cadrage

Si vous ne devez retenir qu’un seul aspect, ce serait celui-ci (avec celui juste en-dessus bien sûr !). Je me répète mais, vraiment, pensez votre photographie comme une image, voire même comme un tableau ! Dans un premier temps, il vous faudra réfléchir à depuis où prendre la la photographie. Laissez-vous aller à chercher un point de vue approprié à votre composition. D’autant que pour un paysage, il est tout de suite compliqué de déplacer un arbre, une montagne, un cours d’eau… Mais cela vaut également pour une scène plus intime ou un portrait. Vous pouvez même vous tenter à oser des angles de vues audacieux (cf : la “Nouvelle Visionavec Alexander Rodchenko) qui dynamiseront votre image. Vous pouvez également viser la neutralité avec une vision frontale (cf : la “Photographie Objective” de l’École de Düsseldorf).

 

Quand on réalise une photo, on fait un cadrage. C’est-à-dire qu’on doit choisir ce qui sera dans le champ ou non (d’où l’intérêt d’avoir différents objectifs). Ensuite, on choisit comment on va le disposer, notamment pour structurer l’image. Il faut donc réfléchir à où placer les éléments dans l’image (ex : À quelle hauteur placer cette ligne de montagne ? Où placer cette fenêtre dans mon image ? Comment placer cette personne ?).

 

Placer un détail qui attirera l’œil donnera un attrait particulier à votre photo de voyage (cf : Rinko Kawauchi). Il y a des compositions très complexes, mais la plus standard, la reine des reines des basiques, s’appelle la règle des 1/3.

Qu’est-ce que la règle des tiers en photographie ?

En fait, il s’agit plus d’un modèle que d’une règle car, je le répète, chacun fait les choix qu’il veut (mais bon, celle-ci fonctionne très très bien !). Cette “règle” est une version simplifiée du nombre d’Or, proportions parfaites chères à la Renaissance. Le principe est simple (et peut-être l’écran de votre appareil photo l’affiche déjà) : la hauteur et la longueur de votre image se divisent chacune en 3, faisant ainsi 2 lignes horizontales et 2 verticales (soit 9 rectangles). Maintenant, l’idée est de placer les lignes de force de votre image (horizon, montagne etc…) sur ses lignes de structure. Il est également conseillé de placer vos éléments forts (personnage, maison, détail etc…) au croisement de ses lignes. Cela dynamisera votre image et cassera la fadeur de la centralité, trop figée (mais attention, cela peut tout à fait être également un parti pris pictural ! ). C’est à ce moment là que vous chercherez équilibre ou déséquilibre, statisme ou dynamisme, frontalité ou profondeur… dans votre composition d’image.

La structuration d’une image se fait, entre autres, par ses lignes de force. Celles-ci sont généralement créées par des lignes “réelles” dans l’image (horizon, perspective, contour….) mais elles peuvent également se faire par un alignement d’éléments forts dans l’image (personnes, bâtiments, arbres…). Au-delà de la “charpente” de la photographie, elles agissent comme les voies de circulation du regard, elles le conduisent. Voici, sans prétention, quelques illustrations que j’ai observées sur notre blog pour bien comprendre ces conseils photo :

 

Le rythme

Répétition périodique (d’un phénomène de nature physique, auditive ou visuelle).” Vous pouvez donc réfléchir à cadencer votre photo en jouant sur la répétition des motifs (personnes, éléments, formes, lignes… et même couleurs). La forme identique ou similaire donnera une fréquence dans la lecture. Imaginez votre œil comme un scan qui parcourt l’image est qui émet un son à chaque répétition d’éléments. À vous d’être plutôt classique, métalleux ou hard-core techno punk !! Sinon, pensez Keziah Jones : Rythm is Love. Yeaheahaaaaa !

 

La profondeur

La plupart du temps, vous aurez à rendre l’espace. Donner de la profondeur à votre image lui apportera du caractère. Pour cela vous pouvez travailler les lignes de perspective afin que le regard soit attiré dans le fond, jouer sur les échelles ou alors jouer avec les plans : composer votre image avec un 1er plan, un second puis un arrière-plan ou un fond. Et si en plus, vous placez tout ça de manière structurée (cf : règle des 1/3), ça risque déjà de “bien rendre”.

 

 

Vous pouvez aussi jouer avec la mise au point, c’est-à-dire la netteté de l’image. Elle se règle avec l’ouverture du diaphragme, plus il est fermé (f:/16) plus la zone de netteté sera grande, plus il est ouvert (f:/4) plus la zone de flou sera grande. C’est ce qu’on appelle la profondeur de champ. Pour le portrait et la macro, on recherche une faible profondeur de champ afin de mettre en valeur le visage (net, par rapport au fond, flou). Après, il existe l’hyper-focale, mais bon… une autre fois peut-être…

 

Au contraire, certaines photos nécessiteront d’être “plates” (depuis le début de ces conseils photo, je vous dis qu’il n’y a pas de règle, il n’y a que des partis pris !). C’est notamment le cas pour certaines architectures où il peut être intéressant de jouer avec le côté massif et imposant du bâtiment avec un cadrage serré par exemple (cf: Bernd et Hilla Becher). Vous pouvez également mettre la couleur et la texture de la façade avec un point de vue frontal, valorisant le plan de l’image, pouvant même allé jusqu’à l’abstraction. Et ici, le travail de composition (placement des éléments) sera très important. Vous concevoir votre image comme une partition de musique par exemple. Sinon, je vous conseille d’aller voir les photographies d’Andreas Gursky, un artiste que j’adore, où les éléments individuels (personnes, fenêtres etc…) deviennent une abstraction dans l’ensemble… Je suis fan !!

 

La couleur et la lumière

Il est peut être très intéressant de réfléchir à la couleur, d’autant que là, c’est physique : les contrastes se créent par la juxtaposition de couleurs chaudes/froides, de couleurs complémentaires (rouge/vert ; violet/jaune ; orange/bleu). Ils excitent la rétine et donneront force et caractère à l’image. Bref, c’est un élément clé si vous voulez que vos photos de voyage “claquent”… (cf : Île de Murano, Venise).

 

Mais vous pouvez également travailler les nuances de couleurs ou même en camaïeu (avant une chaine de magasins de chemisiers, le terme définit la variation de valeur d’une même couleur). Cela peut tout à fait fonctionner pour les paysages. Le classique noir & blanc fait la synthèse du travail sur les contrastes et sur le camaïeu de gris. Il permet également une sorte de mise à distance avec la réalité en convoquant un regard d’esthète. Mais attention à l’excès ! Comme abordé plus haut, je vous conseille de prendre votre photo en couleur et de travailler seulement ensuite le noir et blanc en post-production sur un logiciel.

 

Il existe un moment superbe en photographie : “l’heure bleue”. Il s’agit, en fait, de deux moments puisque cela concerne la période “entre chien et loup” peu après le coucher du soleil et celle peu avant qu’il se lève. Le bleu du ciel est alors très “profond” ! Ce moment est notamment idéal pour des paysages urbains puisque les couleurs chaudes des éclairages contrasteront avec la couleur du ciel.

 

La durée de cette période est naturellement variable selon la saison, mais grosso modo, il s’agit des quelques dizaines de minutes voire, idéalement, quelques minutes. Il faudra vous munir de patience pour attendre le moment propice et également d’un trépied (cf : tests du 190 CXPRO4 et du Befree) puisque le temps de pose sera plus long. Montez les ISO au minimum pour ne pas perdre en qualité de l’image (augmentation de “bruit” numérique).

Juste avant le coucher du soleil, on trouve également “l’heure dorée” (“golden hour”) qui est le moment où la lumière se réchauffe considérablement et les couleurs s’intensifient (ex : un champ de blé en début de soirée en juillet…).

 

Le travail de la lumière est aussi un élément très intéressant pour des photos de voyage. Vous pouvez jouer avec les ambiances lumineuses (froides ou chaleureuses, façon bougie de Georges de la Tour), sur les variations de lumière, les reflets, les effets d’optiques. C’est notamment ici que vous comprendrez les bienfaits de pouvoir quitter le mode automatique ! Vous prendrez la main sur la gestion de la lumière pour votre photographie. De manière générale, sauf si vous savez le maîtriser (cas précis), évitez l’utilisation du flash !! Il écrase la profondeur et tue les nuances avec ses gros sabots. Pensez subtil !!

 

Vérifiez !

Parce que maintenant qu’on photographie en numérique (si vous photographiez encore en argentique, je sais pas pourquoi vous lisez cet article, parce que vous devez maitriser la technique 1000 fois mieux que moi !!) on va pas se priver de ce luxe instantané de pouvoir vérifier si “elle est bonne”. Même si l’écran n’est pas 100% fidèle (luminosité, couleurs…), il reste un moyen immédiat de contrôler pour pouvoir refaire si besoin. Quelle angoisse avant puis quelle déception quand on allait récupérer ses photos de voyage chez le photographe (“je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans…”) et que certaines photos étaient complètement dégueus ! Même si le gentil commerçant ne vous les facturait, il n’empêche qu’on avait bien les boules !

 

LA POST-PRODUCTION

Quoi ? Vous retouchez vos photos ? C’est de la triche ! Moi, je suis #NoFilter moi !”… Le peintre revient sur sa toile, l’écrivain sur son texte, le compositeur sur sa partition, l’architecte sur son plan… bref, n’importe quel créateur. Mais le photographie, lui, ça serait un parjure ? Tiens donc… Comme je vous disais en préambule, une photo n’est pas la réalité. En plus d’être le fruit d’une pensée, elle est automatiquement biaisée par l’interprétation technique que l’appareil photo de l’image lumineuse qu’il reçoit. Et cela varie beaucoup d’un APN à l’autre. La retouche n’est pas un blasphème, elle vient redonner la main au photographe pour fabriquer l’image qu’il souhaite.

S’il est vrai qu’énormément de choses se jouent lors de la prise de vue, une photo n’est jamais tout à fait perdue. C’est assez incroyable tout ce qu’on peut faire sur un ordinateur ! Par contre, autant que possible, bannissez les modes “créatifs” (qui n’ont… rien de créa !). Vous flinguerez tout de suite vos images et là, pour le coup, ça va très très compliqué de rattraper. Et très honnêtement, vous pourrez faire 100 fois mieux sur votre ordi ! En plus, vous pourrez expérimenter comme bon vous semble avec autant de “ctrl + z” que vous voudrez !!

Corriger vos images

Là encore, il ne faut pas se priver. Certes, ça prend un peu de temps (et ça peut même être carrément méga chronophage selon le niveau de perfectionnisme) mais en seulement quelques clics, on améliore déjà beaucoup son cliché : un petit recadrage (notamment pour améliorer la composition, règle des 1/3), une correction de la lumière, des contrastes et des couleurs (quelques clics si vous faites en automatique! ) et vous optimiserez considérablement vos images (cf : Islande, Francfort).

 

Créer un panoramique

Pratiquant la randonnée, j’apprécie les vastes espaces qu’offre la montagne et c’est très frustrant de ne repartir qu’avec des fragments photographiques de cette étendue visuelle. Du coup, peut-être l’avez-vous remarqué, j’aime bien les panoramiques. Pour cela, il y a tout un tas de logiciels dont Canon PhotoStitch, Photoshop (fonction Photomerge), Lightroom etc…

La tentation (et je suis le premier à essayer de lutter contre ! ) de prendre un panorama hyper large est grande. Après, à vous de voir selon ce qui vous plait, mais je vous conseille de ne pas dépasser un rapport de 1/5. Au-delà, à moins de l’imprimer, soit on aura une maigre bande horizontale, soit il faudra zoomer pour voir les détails… Lors de la prise de vue, je prends les photos en décalant d’un tiers à à chaque fois, histoire d’être certain que le logiciel reconnecte bien les parties (et sans trop de distorsion). Il faut également avoir le même réglage temps/diaphragme et un focus bloqué (manuel). Évitez les plans trop rapprochés, le logiciel aura du mal à comprendre. Dans le meilleur des cas, il fera l’image avec une distorsion étrange, dans le pire, il refusera de faire le photomontage.

 

EN CONCLUSION

Cet article de conseils photo est nullement présomptueux et il y aurait tout un tas de choses à dire et à… contredire ! Je ne parle pas de “selfie” devant la Tour Eiffel (enfin, ce qui devrait normalement s’appeler un autoportrait si des abrutis n’avaient pas décidé de sacraliser ce narcissisme, de surcroît par un terme anglophone branchouille) car, si vous suivez un peu mes articles, vous aurez remarqué que ce sont rarement les personnes qui m’intéressent dans mes photographies… Et moi encore moins ! Vous prendrez ici ce que vous voudrez et j’espère qu’il vous aura été utile. Maintenant, l’idée c’est : prenez votre appareil, mettez tout ça en pratique, expérimentez et surtout… amusez-vous !! Au passage, regardez des images de photographes professionnels et posez-vous ces mêmes questions. Cela aiguisera votre regard et votre curiosité. Et j’espère que j’aurai réussi mon pari : vous avoir aidé à donner un peu plus de niaque à vos photos de voyage.

© L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷




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2 Comments

  • Vincent Galiano dit :

    De bons conseils, c’est un article assez complet, même si le sujet est vaste. Une bonne introduction en somme! Pour ce qui est des panoramiques, beaucoup d’appareils photo les font directement aujourd’hui…

    • Édouard dit :

      Merci Vincent,
      Oui, l’idée était ici d’être synthétique en laissant l’exhaustivité aux livres consacrés.
      Pour ma part, je ne fais pas confiance aux APN pour les panoramiques. Les logiciels sont bien plus fiables et précis.

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