La CITÉ DU VIN, terroir et modernité à BORDEAUX

La Cité du Vin Bordeaux Gironde Aquitaine France Tourisme Vacances - Visit France Travel Holidays Architecture XTU Architects

Avec la Cité du Vin, Bordeaux s’est dotée d’un monument contemporain à la mesure de son histoire. Nouveau signe architectural fort dans la ville, ce musée met à l’honneur le « nectar des dieux », non seulement en Gironde mais également en France et dans le Monde, à travers son caractère ancestral et universel. Ma visite et mon avis sur ce lieu d’intérêt désormais incontournable à Bordeaux !

Une architecture audacieuse

Située tel un phare au bord de la Garonne, la Cité du Vin se voit en arrivant à Bordeaux. Alain Jupppé, alors maire de la ville, voulait un édifice emblématique : « Ce sera mon Guggenheim » avait-il déclaré. En effet, depuis le célèbre musée à Bilbao de Frank O. Gehry en 1999, toutes les villes veulent leur musée-iconique (MuCEM à Marseille, Musée des Confluences à Lyon, Musée de la Romanité à Nîmes, Luma à Arles…). Telle une cathédrale consacrant le vin, le bâtiment se voulait donc monumental mais sans pour autant verser dans l’arrogance. C’est le groupe XTU Architects (Anouk Legendre et Nicolas Desmazières) qui a remporté le concours en présentant ce projet associant audace esthétique et ancrage territorial. Les deux architectes se sont fait également remarquer en 2015 pour avoir conçu le pavillon français à l’Exposition universelle de Milan. Après 3 ans de travaux, la Cité du Vin de Bordeaux a été inaugurée en mai 2016.

De prime abord, la figure questionne. En effet, dans l’environnement bordelais à l’architecture orthogonale et symétrique du XVIIIe siècle, ici, la forme, informe, toute en courbes, aucun angle droit, contraste, s’impose en rupture. Une base large dont point une jaillissante verticalité, seul signe donnant plus ou moins une référence architecturale identifiable à l’ensemble (une tour, un clocher… ?). Mais, en réalité, à l’instar du sujet qu’il expose en son sein, le bâtiment n’a finalement rien d’une esthétique hors-sol. On m’a parlé d’une éventuelle analogie avec un cep, cependant, c’est davantage l’image d’une carafe et surtout du vin tournoyant dans un verre qui m’ont convaincu (notamment après avoir vu cette photo). Du tumulte centrifuge, les lignes tourbillonnent pour s’élever en totem, faisant monument. Cette fluidité des formes est également en résonance avec les ondulations de la Garonne, adjacente. Du reste, comme l’a fait le Musée Guggenheim à Bilbao, ce dynamisme formel rayonne, infuse, insuffle la vie autour de lui : le quartier des Bassins à flot est en pleine mutation, comme cela a été le cas pour celui de Confluence à Lyon.

© L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷

Trônant, la tour laisse place à la transparence avec une alternance de poutres en acier et de vitres sérigraphiées. Plus on monte, plus l’architecture devient aérienne, immatérielle, vaporeuse telles les effluves s’émanant du verre, à l’instar de ces grandes lignes dorées qui tournoient dans un mouvement ascendant (celles-ci ont d’ailleurs été reprises pour faire le logo). Alors, quand le soleil l’illumine, la Cité du Vin se pare de reflets dorés. Selon la météo et l’heure, l’édifice prend vie, s’anime au gré et à la faveur des éclaircies. Le soir, au coucher du soleil, il s’embrase comme un feu sacré dans la ville. On pense alors forcément au jeu de reflets sur les écailles du Musée Guggenheim Bilbao, lui aussi au bord d’une rivière.

En contrepoint de cette pétulance plastique, le regard est séduit par la douce vibrance de la surface. Si l’ocre jaune peut faire allusion à la pierre des façades bordelaises, son irisation légèrement verdâtre reprend quant à elle, histoire de mettre de l’eau dans son vin, les teintes caractéristiques de la Garonne (dues aux sédiments qu’elle brasse et non à la -faible- pollution du fleuve). En plus de ses formes liquidisantes, ce chromatisme permet au monument de s’intégrer dans son environnement immédiat. Une architecture in situ donc, doublement, par son évocation globale ainsi que par ses lignes et couleurs. Pour cela, l’édifice est vêtu de 2240 plaques d’aluminium et 925 panneaux en verre, tous sur-mesure et aux formes uniques. La mate brillance du métal m’a rappelé, de surcroît surgissant des arbres, la « peau » du Musée Juif de Berlin avec son audace pudique.

© L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷

L’ouvrage a été conçu en 9 étages et l’intérieur de la Cité du Vin de Bordeaux a également été élaboré de manière allusive. En effet, le rez-de-chaussée, par lequel on accède, est revêtu de noir, du sol au plafond, marqué de quelques discrets éléments de bois et plusieurs colonnes en béton : autant de signes évoquant ici l’univers souterrain de la cave. On découvre alors la forme en anneau du bâtiment autour d’un atrium diffusant la lumière. À ce niveau, se situent l’accueil et la billetterie, la boutique, la cave à vin et son savoureux restaurant Latitude 20

Ensuite, les premier et deuxième niveaux sont habillés de verre et de bois, matériaux intimement liés à la culture vinicole, et toujours en rondeur (le verre, la bouteille… pour l’un ; la voûte du chai, le fû, le cep… pour l’autre). C’est le lieu de l’auditorium, de la bibliothèque, des ateliers de dégustation, des expositions temporaires ainsi que du parcours permanent. Je vous en parle en détails plus bas. Les niveaux 3 à 6 sont réservés au personnel (bureaux, fonctionnement etc) tandis que le 7e étage accueille un restaurant panoramique, le bien nommé Le 7 restaurant.

Visite de la Cité du Vin

Un parcours à la découverte du vin

Mais la Cité du Vin de Bordeaux est aussi, et surtout, un lieu qui se visite ! Ne disposant pas d’une collection permanente, il n’est pas un musée à proprement parler mais ce n’en était de toute façon pas le dessein. L’idée, dans son essence, était de dédier un espace à la découverte du vin, à travers les prismes historique, géographique, sociétal, technique, scientifique, artistique… Pour cela, la scénographie, conçue par l’agence Casson Mann, a investi les 3500 m2 avec 19 modules en 6 grandes thématiques (plan) dans un parcours immersif, didactique, ludique et sensoriel. À l’entrée, un boitier numérique est remis avec un casque (non-intrusif dans les oreilles et donc avec la possibilité de parler et d’entendre autour de soi : on n’est pas seul dans son casque !). Avec cet audioguide, on active la borne où on se trouve et celui-ci diffuse le contenu audio (huit langues au choix).

Projections vidéo en mapping, écrans interactifs, objets, installations… Le parcours est libre et on déambule de secteur en secteur au gré de ses envies. Toutefois, le bâtiment étant sous forme d’anneau, l’itinéraire est malgré tout globalement plutôt linéaire. Je ne vais pas faire le détail de chacun des modules (il ne s’agirait quand même pas de tout dévoiler ici) mais, néanmoins, certains ont retenu mon attention plus que d’autres : Survol des vignobles où l’on découvre des paysages improbables sur la planète pour planter des ceps, Terroirs de vignerons et Planètes Vin où l’on apprend l’histoire de la viticulture, La galerie des civilisations à travers les différentes perceptions du vin dans les sociétés, Le tête-à-tête avec les experts où œnologue, sommelier, chef, médecin etc donnent leur avis très intéressants sur les questions vineuses, Au-delà des mers et À table ! pour leur mise en scène immersive. Une mention spéciale au Buffet des 5 sens où l’on renifle sous des cloches les arômes attribués au vin ainsi que des objets évoquant le vocabulaire relatif à la texture et au toucher.

Pour être honnête, je m’attendais à quelque chose d’éventuellement d’un peu prétexté et ennuyeux (un peu comme j’avais vu à la Maison des Climats à Beaune) et, en fin de compte, j’ai vraiment été emballé. Sur la forme, l’espace est particulièrement agréable à parcourir avec un éclairage coloré et du mobilier attrayant. Sur le fond, la muséographie est très riche et captivante avec une multitude et une diversité de contenu. De plus, l’interactivité quasiment permanente rend le spect-acteur de sa visite et ses apprentissages. La rythmée est tout à fait digeste avec des vidéos pas trop longues et pourtant captivantes. Du reste, ce parcours permanent de la Cité du Vin est particulièrement adapté pour une visite avec des enfants, lesquels j’ai vu prendre beaucoup de plaisir à toucher, sentir, regarder, écouter, manipuler… Le parcours permanent devrait être en partie renouvelé d’ici 2023.

Un lieu de vie autour du vin

Enfin, la Cité du Vin de Bordeaux ne se destine pas à être “que” un lieu pour les touristes. À l’instar du MuCEM à Marseille, elle se veut également être un animateur de la vie culturelle locale. Ainsi, le nouveau monument girondin intègre de nombreux autres espaces autour de l’univers du vin dans lesquels se rendre tout au long de l’année. En parallèle du parcours permanent, une programmation artistique propose des expositions temporaires, fréquemment renouvelées. En cet été 2022, c’était Pablo Picasso qui était mis en valeur avec celle intitulée L’effervescence des formes. Se tenant sur sept salles, elle mettait en exergue la place de l’alcool dans l’œuvre protéiforme du natif de Malaga (peintures, dessins, céramiques, film…). D’autres artistes étaient également à l’honneur avec un portrait du cubiste andalou par le pop-artiste islandais Erró, puis quelques œuvres de ses acolytes Juan Gris ou Georges Braque. Pour conclure, même si cela avait, selon moi, davantage l’aspect de l’illustration d’une thématique plutôt que du traitement complexe d’une problématique muséologique, j’ai néanmoins trouvé cela très intéressant que la Cité du Vin élargisse son approche à d’autres regards et médiums. Du reste, cela a permis de découvrir des œuvres de qualité venant de musées réputés (cf : Musée Picasso à Paris, Musée Cantini à Marseille…).

D’autres salles sont accessibles à tous, indépendamment des visites. L’auditorium Thomas Jefferson (en hommage au troisième président des États-Unis, œnophile, qui fit la promotion du vin français en Amérique) propose des spectacles de théâtre ou de danse, des concerts, des projections de films, des conférences… À côté, un salon de lecture met à disposition sous sa voûte en bois plus de 1800 ouvrages (à consulter sur place). Évidemment, des ateliers de dégustation sont également organisés autour de plusieurs thèmes au choix, dont celui, particulièrement novateur et apparemment sensationnel, intitulé Vins du Monde, avec un système immersif vidéo à 360°, musical et olfactif ! Pour ma part, j’ai fait une initiation avec le sommelier Bertrand Bijasson qui nous a fait découvrir le vocabulaire œnologique et la manière dé déguster, avec beaucoup de simplicité et d’humour. 1h de plaisir !

Au rez-de-chaussée, on retrouve, classiquement dans chaque musée, une boutique, avec une multitudes d’objets de design et de produits dérivés autour du vin. Et il y a de belles surprises ! De quoi assurément faire le bonheur d’un amateur de vin. Juste après, la cave, une salle circulaire exposant des bouteilles du Monde entier (plus de 70 pays !) sur des présentoirs en bois sur fond noir. On s’y croirait et l’ivresse nous gagne rien qu’en laissant vertigineusement tourniquer les yeux sur les étiquettes. Si vous cherchez un vin, vous le trouverez surement parmi les 800 références sélectionnées.

Enfin, par un ascenseur, on atteint le 8e et dernier étage avec sa salle très lumineuse, au plafond est recouvert de bouteilles en guise de lustres. Le billet du parcours permanent donne droit à un verre de dégustation parmi une sélection de vins du Monde. On accède ensuite aux coursives extérieures de la tour. « Climax » de l’expérience architecturale, le belvédère situé à 35 mètres du sol expose Bordeaux à 360° : de monument voyant, il devient alors réciproquement mirador. On observe la Garonne et le pont d’Aquitaine, les quais, les flèches dépassantes de l’église Saint-Louis des Chartrons, de la cathédrale Saint-André de Bordeaux et de la basilique Saint-Michel ainsi que le néo-quartier des Bassins à flot. La promenade en hauteur derrière l’enveloppe de verre rappelle quelque peu l’expérience des terrasses sous les voiles gehriennes de la Fondation Louis Vuitton.

La Cité du Vin de Bordeaux héberge également deux restaurants, ouverts à tous : Le 7 restaurant, au 7eétage de la tour, pour un repas panoramique sur le paysage urbain, et le restaurant bistronomique Latitude 20, au rez-de-chaussée. C’est dans ce dernier que j’ai déjeuné le midi. Installé sur la terrasse orientée au Sud, je me suis régalé avec le menu du marché : houmous de fèves et coriandre, salade de chou rouge au sésame puis filet de poisson de la criée accompagné d’un caviar d’aubergine, d’un coulis de poivron et d’une chips de chorizo. En dessert, un tiramisu framboise et citron vert. Un vrai délice pour une formule tout à fait accessible (24€ ; entrée-plat / plat-dessert à 19,5€). Une autre bonne raison de venir et revenir : la carte change chaque semaine ! Le restaurant dispose également d’un snack pour un repas plus rapide.

Enfin, les jardins, en accès libre, sont un agréable petit espace vert à la sortie de la visite, presque insoupçonné depuis la rue (seul parc à proximité, certains locaux savent toutefois y faire une pause fraîcheur). L’idée était de préserver l’esprit des berges de la Garonne avec sa végétation. D’ailleurs, par un ponton aménagé, on peut accéder à la Cité du Vin en bateau, moyen de transport historique à Bordeaux. Une exposition jalonnait le chemin avec des portraits de viticulteurs girondins par Yann Arthus-Bertrand. J’en ai profité pour apprécier de près l’architecture du bâtiment et les reflets mats sur sa séduisante enveloppe dorée.

En fin de compte, la Cité du Vin de Bordeaux a été une très agréable surprise ! Pour être honnête, en arrivant le matin, je pensais y passer juste quelques heures. Mais, particulièrement séduit par l’architecture du bâtiment et finalement très intéressé par la muséographie (qualité et diversité des contenus, mise en scène), j’y ai passé quasiment toute la journée ! Je vous recommande vivement la visite, même et surtout en famille, tant le contenu a été rendu accessible et ludique. De plus, c’est un lieu où vivre des expériences multiples et variées (expositions, ateliers, repas…).

Infos pratiques

Adresse : 134 Quai de Bacalan, 33000 Bordeaux
Tarif : 21€ adulte (pré-vente coupe-file) / Bordeaux City Pass
Horaires : tous les jours, 10h-19h l’été (18h en semaine durant l’année)




Booking.com




Vous aimez cet article ? Parlez-en à vos amis et inscrivez-vous à notre newsletter

D’autres articles sur les mêmes thématiques

Bordeaux

Musées

France

Laisser un commentaire